Le travail temporaire


Recourir au travail temporaire

Dans un contexte économique fluctuant, les entreprises recherchent toujours plus de flexibilité. L'intérim peut être une solution. Mais la réglementation encadre strictement ce mode de travail afin d'en limiter la précarité.

| L'Entreprise (n° 234) | Mis en ligne le 01/05/2005



Accélération des cycles économiques, visibilité à court terme, exigences de réactivité..., les entreprises ont besoin de plus de flexibilité. Pour répondre à cette nécessité, elles peuvent annualiser et lisser la durée du travail, recourir aux CDD (contrats à durée déterminée) ou faire appel à une entreprise de travail temporaire (ETT). Il s'agit, dans ce dernier cas, de sous-traiter la gestion des ressources humaines, ce qui a un coût. En contrepartie, l'entreprise qui a recours à l'intérim, dite entreprise utilisatrice, fait l'économie du recrutement (annonces, tests d'évaluation) et de la gestion du personnel (contrats de travail, paie). Le Code du travail prévoit les règles qui définissent les relations entre les trois parties : l'ETT, l'intérimaire et l'entreprise utilisatrice.

Les conditions de l'intérim

- Les modalités du recours. Le Code du travail prévoit qu'un « contrat de travail temporaire [...] ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise utilisatrice » (article L. 124-2). Un tel contrat ne peut être conclu que pour exécuter une tâche précise et temporaire appelée « mission » et seulement dans certains cas : pour remplacer un salarié absent, pour faire face à un surcroît temporaire de travail ou, enfin, pour exercer une activité à caractère saisonnier (restauration, audiovisuel...) ou temporaire par nature (déménagement). Une ordonnance du 24 juin 2004 a élargi les cas de recours au remplacement d'un dirigeant d'entreprise ou de son conjoint. Attention, l'intérim est interdit pour remplacer un salarié gréviste, pour effectuer des travaux particulièrement dangereux ou pour remplacer un médecin du travail (article L. 124-2-3).

- Le délai d'attente entre deux intérimaires. Une entreprise ne peut pas embaucher immédiatement après la mission d'un intérimaire un autre intérimaire ou un salarié en CDD. Elle doit attendre « une période égale au tiers de la durée du contrat de mission venu à expiration [...] si la durée de ce contrat, renouvellement inclus, est au moins égale à quatorze jours ». Pour une mission plus courte, le délai d'attente est égal à la moitié de la durée du contrat (article L. 124-7). Ce délai est calculé en jours d'ouverture de l'entreprise. Si, par exemple, une entreprise ouverte du lundi au vendredi a conclu un contrat de travail temporaire de six jours qui se termine le vendredi soir, le délai d'attente est de trois jours. Aucun contrat ne peut être conclu pour ce poste avant le mercredi soir suivant. Toutefois, il n'y a aucun délai d'attente lorsque le contrat est conclu pour remplacer un salarié absent ou un dirigeant d'entreprise, lorsqu'il faut réaliser des travaux urgents par mesure de sécurité, en cas d'emploi saisonnier, de rupture anticipée du contrat par l'intérimaire ou de refus de sa part de renouveler le contrat.

Deux contrats pour une mission

- La mission de travail temporaire. Chacune fait l'objet de deux contrats : le contrat de mise à disposition, qui lie l'entreprise utilisatrice et l'ETT ; le contrat de travail temporaire, arrêté entre l'ETT et l'intérimaire. Les contrats doivent être conclus au plus tard deux jours après la mise à disposition du travailleur.

- La durée de la mission. En principe, le contrat de mise à disposition doit comporter une date de fin de mission. Toutefois, lorsqu'il est conclu pour remplacer un salarié absent ou pour effectuer un travail précis, son terme correspond à la fin de la mission. Il peut être renouvelé une fois et la durée totale de la mission ne peut excéder dix-huit mois. Cependant le contrat ne doit pas dépasser neuf mois si l'intérimaire est embauché dans l'attente d'un salarié en CDI ou pour effectuer des travaux urgents nécessités par des mesures de sécurité (article L. 124-2-2). Le contrat peut durer jusqu'à deux ans dans trois cas : lorsque la mission est exécutée à l'étranger, lorsque l'intérimaire remplace un salarié parti définitivement avant la suppression de son poste et, enfin, en cas de commande exceptionnelle à l'exportation. Notez que des aménagements sont possibles puisque « le terme de la mission prévu au contrat ou fixé par avenant peut être avancé ou reporté à raison d'un jour pour cinq jours de travail » (article L. 124-2-4).

- Les mentions obligatoires. Il faut prévoir six rubriques dans le contrat de mise à disposition : le motif du recours à l'intérim et, le cas échéant, le nom de la personne à remplacer, le terme de la mission, la clause éventuelle permettant de modifier ce terme, les caractéristiques du poste (qualification professionnelle exigée, lieu et horaire de la mission), l'équipement de sécurité nécessaire en précisant s'il est fourni par l'ETT, enfin, le montant de la rémunération avec « les primes et accessoires de salaire que percevrait dans l'entreprise utilisatrice après période d'essai un salarié de qualification équivalente occupant le même poste de travail » (article L. 124-3). Le contrat ne peut en aucun cas interdire l'embauche de l'intérimaire à l'issue de sa mission.

Le contrat de travail temporaire conclu entre l'ETT et le collaborateur intérimaire doit reproduire toutes les mentions du contrat de mise à disposition. De plus, il indique la qualification du salarié, les modalités de sa rémunération, l'éventuelle période d'essai et « le nom et l'adresse de la caisse de retraite complémentaire et de l'organisme de prévoyance dont relève l'entreprise de travail temporaire » (article L. 124-4).

Le statut de l'intérimaire

- L'intérimaire est un salarié de l'entreprise de travail temporaire. C'est en principe l'ETT qui se charge des obligations relatives à la médecine du travail. Elle veille aussi à respecter l'égalité de rémunération entre l'intérimaire et un salarié de l'entreprise utilisatrice ayant une qualification équivalente et occupant le même poste de travail, y compris les primes, et accessoires de salaire et le paiement des jours fériés. L'intérimaire perçoit en outre une indemnité compensatrice de congés payés égale à 1/10 de sa rémunération brute totale. Bien qu'il ne soit pas un salarié de l'entreprise utilisatrice, celle-ci est toutefois responsable des conditions de travail de l'intérimaire au regard de la réglementation sur le temps de travail, le travail de nuit ou encore l'hygiène et la sécurité. L'intérimaire a droit aux installations collectives dans les mêmes conditions que les salariés de l'entreprise : cantine, bibliothèque, parking, etc.

La protection sociale

- Les intérimaires relèvent du régime général de la Sécurité sociale. Sauf si l'ETT consacre son activité exclusivement à l'agriculture : dans ce cas, les intérimaires dépendent du régime des salariés agricoles. Les cotisations sociales patronales sont à la charge de l'ETT. Pour le calcul de l'ancienneté, c'est l'ETT qui compte, quel que soit le nombre d'entreprises où les intérimaires sont envoyés. Les intérimaires profitent des avantages offerts par l'entreprise d'intérim, comme la participation aux bénéfices ou les voyages organisés par le comité d'entreprise. Ils bénéficient également d'une mutuelle complémentaire financée par l'ETT. Il s'agit d'un régime qui complète les indemnités journalières de la Sécurité sociale en cas de maladie, d'accident du travail ou encore de congé de maternité. En outre, les intérimaires sont affiliés à une caisse de retraite complémentaire et ils ont droit aux allocations de chômage.

La fin de la mission

- Le contrat de travail temporaire prend fin à l'échéance prévue. La précarité du salarié intérimaire est compensée par une indemnité de fin de contrat égale à 10 % de sa rémunération brute totale. Cette indemnité est versée par l'ETT. Toutefois, elle n'est pas due en cas d'emploi saisonnier, dans le cadre de la formation continue et en cas de rupture anticipée pour faute grave, force majeure ou du fait du salarié (article L. 124-4-4). Attention, l'indemnité de fin de mission n'est pas prise en compte pour comparer la rémunération de référence d'un salarié occupant le même poste dans l'entreprise utilisatrice.

- La rupture anticipée du fait de l'employeur. L'employeur peut rompre le contrat avant son terme en cas de faute grave ou de force majeure. Notez que la rupture du contrat de mise à disposition ne constitue pas un cas de force majeure. Dans les autres cas, il doit trouver une nouvelle mission équivalente dans les trois jours ou assurer à l'intérimaire une rémunération équivalente à celle qu'il aurait perçue jusqu'au terme du contrat, y compris l'indemnité de fin de mission.

- La rupture anticipée à l'initiative du salarié. La rupture anticipée du fait du salarié ouvre droit à des dommages intérêts pour l'ETT, sauf si l'intérimaire justifie d'une embauche en CDI. Il doit cependant respecter un préavis égal à un jour par semaine de mission restant à accomplir. Le préavis minimal est de un jour et ne peut dépasser deux semaines.

À RETENIR

 

Modalités

- La loi encadre strictement les cas de recours au travail temporaire et impose un délai d'attente entre deux contrats « précaires ».

Mission

- Un contrat d'intérim ne peut en principe durer plus de dix-huit mois, renouvellement inclus.

Engagement

- La relation tripartite du travail temporaire repose sur deux contrats : - le contrat de mise à disposition conclu entre l'entreprise utilisatrice et l'ETT ; - le contrat de travail temporaire entre l'ETT et l'intérimaire.

Statut

- L'intérimaire est un salarié de l'entreprise de travail temporaire et non de l'entreprise utilisatrice.

Rémunération

- Les intérimaires perçoivent un salaire au moins égal à celui d'un salarié occupant un poste identique dans l'entreprise utilisatrice, plus une indemnité de congés payés et une indemnité de fin de mission.

Protection sociale

- La couverture des intérimaires est équivalente à celle des salariés en CDI.

 

LA RESPONSABILITÉ DE L'ENTREPRISE DE TRAVAIL TEMPORAIRE

 

EN CAS DE DOMMAGE CAUSÉ par un intérimaire, l'entreprise utilisatrice peut demander une indemnisation à l'ETT, à condition de prouver une mauvaise exécution du contrat de mise à disposition. C'est par exemple le cas si l'ETT n'a pas vérifié la qualification professionnelle de l'intérimaire, notamment pour les professions médicales, le gardiennage ou la surveillance. Il en va de même pour les antécédents des salariés : l'ETT sera jugée responsable des détournements d'un intérimaire déjà condamné pour de tels faits (Cour de cassation, 26 février 1991).

 

LES SANCTIONS SPÉCIFIQUES AU TRAVAIL TEMPORAIRE

 

TOUTE INFRACTION AUX OBLIGATIONS du travail temporaire est punie de 3 750 euros d'amende et/ou de six mois de prison (article L. 152-2 du Code du travail) et d'une éventuelle publication du jugement dans la presse. C'est ce que risque l'ETT qui ne conclut pas de contrat dans les deux premiers jours d'une mission, qui ne mentionne pas la rémunération due à l'intérimaire dans le contrat de travail temporaire ou qui exerce son activité sans avoir fait les démarches administratives obligatoires. L'entreprise utilisatrice encourt les mêmes peines lorsqu'elle a recours à l'intérim dans des cas interdits par la loi, ou sans contrat écrit, ou encore si elle ne fournit pas les informations légales sur la rémunération de référence.

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